le couple, un seul "Soi" ?


Samedi 5 Mai 2018

“Couplage jungien” (2015)

Nous sommes en 2015. Depuis 2010, ma formation en psychologie transpersonnelle m'informe sur le travail du psychanalyste Carl Gustav Jung et sur la notion de Soi (dont il est régulièrement question ici). A l'automne de cette même année, je participe à un atelier d'une journée animé par le psychologue et auteur Jean-François Vézina—président pendant plus de 7 ans du Cercle Jung de Québec. Jung me passionne par sa capacité de plongée introspective (en 1ère pers.) et de remontée conceptuelle récapitulative (en 3è pers.).

Les notions ici à propos de l'inconscient (selon le genre ou non) sont multiples : supra et sub-conscient, Soi et ombre, anima et animus,... ; et leur agencement “selon l'arbre” périlleux. Je me suis pourtant courageusement et effrontément lancée dans le défi.
Ma compréhension mêle ici également, à la marge, des approches non-jungiennes —comme celle de “karma”, celle “d'annales akashiques”, ou encore celles de “vide quantique” ou “d'espace hors-temps” (un emprunt au physicien Philippe Guillemant).
L'idée de “descentes supra-conscientes” (vibratoires) versus de “remontées subconscientes” (conscientisées) est une vue de l'esprit—en ce sens qu'il s'agit là d'une accommodation représentationnelle figurant le plus élevé vibratoire (émotionnellement gracieux et joyeux) “au-dessus” du plus bas vibratoire (émotionnellement dépressif, mais rigoureux) ou du plus “grossier”.
L'idée est aussi celle du “couple”—du mode de couplage synchronistique des inconscients dans l'amour partagé et durable. ...
Arbre Relationnel d'approche "jungienne"—à propos du couple. (akmi, octobre '15). Cliquer.

“Le couple” (selon une approche d’inspiration jungienne)

1 - l'enveloppe consciente (le corps) vs la vie intérieure (l'âme) >> anima / animus (du genre opposé au corps) >> pour équilibre de la personnalité >> “qualités” à conscientiser pour les intégrer >> sinon actualisation du versant négatif
2 - trois étages de la psyché :
  • le conscient >> appréhende psychiquement les phénomènes (ext. ou int.) > la propre existence de l'individu
  • le subconscient—sous le niveau du conscient >> le passif karmique (“ombres” > personnelles & collectives)
  • le supra-conscient—coiffe le conscient >> le Soi (entièreté supérieure, axe d'émergence / essence divine)
3 - remontées subconscientes des mémoires karmiques (ombres—& mérites) >> puisent dans les “annales akashiques”
  • ➢ “poubelles” et “trésors” >> à alchimiser pour s'en libérer >> sinon “éternel retour” (> nouvelle incarnation)
4 - descentes supra-conscientes lumineuses (“numineuses”) >> du Soi individuel (ou partagé > par des familles de créatures appartenant à divers règnes) >> connexion vers son “individuation” (l'effort de toute une vie)
  • ➢ à entretenir (par des méditations) >> élévation vibratoire >> retour expérientiel à son essence divine
  • synchronicités >> messages d'appel / de manifestations du Soi dans la réalité matérielle (chaos > trickster)
5 - vers le “Soi du couple” >> synchronisation des inconscients (sub et supra) >> unité accordée—non-duelle
  • ➢ compatibilité subconsciente & convergence dans réalisation des “Soi individuels” >> accomplissements parallèles
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... Car, au fond, qu’est-ce que je partage avec l’autre ?

Rencontrer “un autre” sur le plan de l’amour amoureux, c’est dangereux. Dangereux... parce que cela implique notre intégrité à tous les niveaux que nous sommes en vérité. Tous ces plans de nous qui s’accompagnent et se superposent à la manière d’un millefeuille—d’une systémie multi-couches sans cesse fluctuante et reconfigurée.
Nous sommes un "petit arbre" à nous tout seul. Par conséquent, le couple est le rapprochement de deux "petits arbres"—déjà intrinsèquement feuilletés et polarisés.
Il y a là d’où nous venons : de cet enchevêtrement de lumière originelle et d’ombre karmique ; et il y a la manière d’expression de ces aspects de “nous”... en nous, humains.
Il y a l’aspect de notre corps—de notre enveloppe charnelle sexuée ; et il y a l’aspect de notre inconscient : lui aussi “sexué” ? selon une polarité inverse à celle exprimée par le corps ?... en complément de ce qui physiologiquement à la naissance nous est imposé.
Je continue de contempler cette état des choses. Et je m'interroge. Est-ce que dans la proposition de l’Arbre persiste un flou sur le rapport qu’entretiennent les différentes notions qui disent l'inconscient ? Le Soi supra-conscient est ici polarisé avec l'ombre subconsciente. Sur un axe verticalisé, il y a le supra-conscient “supérieur” et le subconscient “inférieur” (alias le Soi et l'ombre) ; sur un axe horizontalisé, on trouve bilatéralement l'animus et le corps conscient pour la femme (à gauche), et l'anima et le corps conscient pour l’homme (à droite). Le clivage "supra vs subconscient" s’opère donc transversalement, tandis que le clivage "animus vs enveloppe féminine" ou "anima vs enveloppe masculine" se présente longitudinalement.
Ma question est celle de l’intrication de ces notions. Existerait-il des ombres karmiques (négatives ou positives) plutôt féminines (l'anima) pour l'homme ; et des ombres karmiques (négatives ou positives) plutôt masculines (l'animus) pour la femme ? Et le Soi ? Subit-il la même contrainte ? Est-il régi par la même loi ? Est-il lui aussi à tendance polarisée opposée au sexe (ou au genre) de “son humain” ? Cette hypothèse a priori paraît absurde ! Elle l’est. Sans éluder la question, notre réflexion en la matière se suspendra donc là. ...
Plus directement, ce qui ressort de cette approche sommaire, c’est que l’axe horizontal de l’Arbre se trouve fondamentalement sexué, différencié ; au contraire de l’axe vertical—qui lui réunit, fond, associe les polarités en une non-dualité de principe, seule à pouvoir “recevoir” le Soi. Comment s’harmoniser au sein de son propre “couple intérieur” devient donc un sujet majeur. Si je suis un homme, comment intégrer consciemment “mon anima” pour que je sois “complet” en connexion avec mon Soi ? Si je suis une femme, comment intégrer consciemment “mon animus” pour que je sois “complète” en connexion avec mon Soi ?
C’est pourquoi la forme conique du Soi exprime une convergence : l’unification de deux indomptables complémentaires.
Il en va de même, à un niveau fractal supérieur, pour le Soi du couple. Lequel agence et fusionne deux individus par la tranche la plus élevée d’eux-mêmes : leur Soi individuel.
Dès lors, on peut déjà assez bien imaginer que ce qui ne sera pas ou mal harmonisé sur le plan personnel, se trouvera in-harmonisable à l’échelle du couple.
La manière première dont le couple a de s’enclencher est sans doute via l’outil (contestable et contesté) des “projections”—liant inextricablement les ombres de chacun. Que faut-il penser de ces projections ?
Je crois que les projections, il faut les “garder”, car elles sont primitives, évolutives, et pour cela, utiles. Il nous faut les regarder et les mettre au service du lien—au dedans de soi et en dehors de soi. Je n'ai a priori aucun rejet pour ce qui nous permet de “nous lier” de l'intérieur et avec l'extérieur : en l'occurrence, au sein de cette 3è personne qui est le couple. Les projections sont “des véhicules”—les nôtres. Elles font partie de la montée du “petit” (en référence à l'article précédemment écrit à ce sujet). Pour autant, les voiles qui empêchent la perception empathique de fond restent coûte que coûte à lever. Je dirais donc que les projections sont des imperfections, des péchés mignons de l'homme, qui lui permettent son cinéma de vie (“relatif”), qui lui donnent de l'énergie (car la nature n'aime pas le vide !)... sans l'empêcher de tendre vers l'ontologie des êtres et des situations. Mais qu'il ne faut pas s'y attacher.. . ni ne rien saisir en elles, car les projections se transforment et passent... Ma tolérance pour elles est pragmatique, plus qu’idéaliste, même si la rigueur à l'égard de “la vérité” des choses demeure extrême chez moi.
Les projections, c'est de la terre, au départ informe, à sculpter : une “matéria prima”, sans laquelle aucune forme finale ne serait. Pas une motte “à retirer” donc, mais une motte sans cesse à raffiner pour qu'elle s'accorde toujours mieux avec son véritable sujet.
L’homme donc, projette l’idéal de son anima sur la personnalité féminine de sa compagne. Et la femme projette l’idéal de son animus sur la personnalité masculine de son compagnon. Est-ce un leurre ? Ou plutôt un transit, un chemin d’approche et d’accroche, pour fabriquer et consolider l’union qui elle, ne se réalisera qu’au niveau du Soi commun... et des affinités subtiles.
Le couple, ce sont donc des polarités complémentaires—qui amorcent leur danse par des malentendus peut-être, nécessitant des ajustements. Car dévoiler la réalité de ce que l’on est et de qui est l’autre—creuser cela—est l’affaire de toute une vie... à deux.
Si, au sein du couple, il y a entrecroisement des projections masc./fém. pour un ficelage bien serré devant tenir lieu de synchronisation, qu’y a-t-il aussi de plus exaltant ? Et ce plus exaltant fait-il lui aussi, pourquoi pas, l’objet de projections ?
Quand je te perçois, je ne veux voir que toi... en ton Soi, ton merveilleux. Qu’est-ce que cela raconte-t-il alors de moi—et de mes ombres projetées sur toi ? Et si je te voyais vraiment juste ?... juste comme tu es toi, sans moi. Juste aussi comme c’est possible pour moi au plus élevé de ma réalisation ? Et si j’étais aussi cela pour toi. Une âme simplement... qui révèle la tienne, et la timbre comme un vibraphone. Mon vibraphone est dans le besoin du tien ; et puisque le niveau ici est celui des longueurs d’ondes, c’est bien ta complétude vibratoire qui permet la mienne, et réciproquement... jusqu’à ce que les deux amplifient leur frisson.
C’est hors de moi ; c’est hors de toi. C’est tout en dedans de rien : ce “rien” résultant de la dissolution de ce qui s’ajuste exactement, et ne dit plus rien... La dissolution de ces parts de nous initialement duelles—qui s’emboitent en un millefeuille nouveau : celui du “nous” (via les possibles projections) ; ... en une synchronie nouvelle : celle du “plus que nous”—sans doute Lui, le Tout.

akmi, 5 mai ‘18 - 20h55

Annexe : “anima” et “animus” chez C. G. Jung [source : wiki]

Ces deux éléments fondamentaux de la psyché ne sont pas symétriques. En effet, l'anima est l'archétype de “la vie en soi”, qui procure expérience et connaissance chez l'homme. C'est une fonction régulatrice, qui a pour but d'adapter le conscient à l'inconscient, or l'animus est lui “un logos” désignant une fonction de discrimination.

L’anima (yin) évoque donc bien la souplesse d’une “mise en relation” affective, tandis que l’animus (yang) apparaît comme une opération de séquentialisation de l’architecture conceptuelle.

Leurs manifestations sont également divergentes :
“Pour décrire en bref ce qui fait la différence entre l'homme et la femme à ce point de vue, donc ce qui caractérise l'animus en face de l'anima, disons : alors que l'anima est la source d'humeurs et de caprices, l'animus, lui, est la source d'opinions ; et de même que les sautes d'humeur de l'homme procèdent d'arrière-plans obscurs, les opinions acerbes et magistrales de la femme reposent tout autant sur des préjugés inconscients et des a priori.” ~ C.G. Jung, Dialectique du moi et de l'inconscient, Idées / Gallimard, 1973, p. 181.
“Si, chez l’homme, l’anima apparaît sous les traits d’une femme, d’une personne, chez la femme l’animus s’exprime et apparaît sous les traits d’une pluralité.” ~ C.G. Jung, Dialectique du moi et de l’inconscient, Gallimard, 1971, p. 215.

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