l’enfant-nounours


Jeudi 19 Avril 2018
Quand j’écris, soit je me structure et me vide, soit je m’assouplis et me remplis. Quand je classifie, rapidement je me retrouve avec “plus rien !”. L’exercice de séquentialisation liquéfie les substances vives et pleines—à l’enchaînement “confus”, parce que riche et chevauché, au profit de fils de fer 3D venant sévèrement les étriquer. J’éprouve une difficulté sensorielle avec la clarté .)
En attendant “mon enfant est là”—imprécis et troué : encore mal formé. La page ici est “une poche” à l’intérieur de laquelle il se protège pour poursuivre sa gestation : continuer de l’aménager selon des rythmes serrés—qui n’évitent pas certains écueils > approximations et angles morts. La poésie suggère et rapproche, mais parfois, elle floute le propos et le contourne un peu trop. Pour immiscer mon message—celui de l’Arbre, je cherche pourtant à toucher le cerveau du lecteur par “son milieu” (ou dans sa globalité) : par le biais d’une synchronisation hémisphère droit (sensible, imaginatif, spatial) / hémisphère gauche (rationnel, logique, discursif). Je cherche à emmener le lecteur dans l’incertain d’une substance psychique et physique—au sein de laquelle son intuition propre fera “évènement”. Je cherche à le déclencher à l’endroit même où cela se déclenche pour moi.
Cet essai n’est donc ni propre au cerveau gauche, ni propre au cerveau droit. Il se ballade dans un indistinct très sûr de lui—de son tracé, de son organisation, et qui progressivement se fixe plus finement et s’éclaire... enfin.
Mon enfant “à tête de nounours poilu”, s’affirme via une originalité non-agressive et se défend via son désir d’intégration bienveillante. Mon enfant ne sollicite qu’un regard doux sur lui, ainsi qu’une perception vive, mais sans déchirement. Quelques étincelles ; pourquoi pas un foudroiement, mais sans l’arrogance d’un “je sais vraiment”. Mon enfant se ballade volontairement en eaux troubles, puisqu’il nage dans l’UNconscient. Qu’il entraîne le lecteur dans cet intermédiaire parfait de “l’entre fond-informe-forme”. Qui de l’informe ou de la forme tapisse “le fond” ? Il y a deux fonds (deux altérités absolues) : l’un pour la matière (“la forme” à laquelle elle aspire) et l’autre pour l’informationnel (“l’informe” sur lequel venir s’inscrire). C’est là encore l’affaire d’un mariage en-lacé.
Mon enfant est le fruit du masculin et du féminin. De la gauche et de la droite. De la forme et de l’informe. Il se glisse au milieu de ses parents—avec l’expression de l’un et de l’autre. Il exprime leur prolongement génétique, certes sur un mode croisé, mais surtout en l’expression d’une “nouveauté” alchimique ne ressemblant tout à fait ni à l’un, ni tout à fait à l’autre. Il est le “3” définitif et temporaire—absolument “royal”.
Je me trouve porteuse de lui, l’enfant-nounours, à la mesure de mon histoire parmi les hommes. J’ai toujours tout mélangé ! Toujours postée dans l’entre-deux des situations et/ou des disciplines ; toujours arc-boutée, “à cheval” sur deux cadres de pensée ou sur deux environnements de spiritualité ; toujours “nulle part” en ce que ce “nulle part” n’appartient rien qu’à moi. De là, mon attachement et mon soin, en tant que thérapeute-psychanalyste, pour ce qui relève de la “création de soi”. ...
Mon enfant-nounours, est-ce un autre que moi ? Je ne crois pas. Je le fabrique en moi au fur et à mesure que je me fabrique moi. Je deviens en quelque sorte ma propre altérité sous mes doigts. Et quand je dis cela, c’est en fait mon Soi qui enfante de sa persona. Dans la vie avancée, on est tous sujets à cette transformation-là : tous appelés à cette vigilance-là. Chez moi, celle-ci se réalise aux fil des multiples altérations d’une “pâte liante”—que je maintiens intentionnellement “liée” au risque de l’amalgame... au risque même de l’ignorance !... Pour se poser sans heurter, les fulgurances successives ont besoin de terrains souples—non figés, non fermés. Des terrains meubles, animés par une soif de justesse et de vérité. Des terrains faméliques “de manque” (conscient et inconscient), appelant leur complément.
Je me maintiens donc “en infra-soi”... pour magnétiser la venue de l’éclair en moi... pour en dérouler la trace et en manifester le flux—tous deux énergétiques, au fil de textes automatiques débridés. Mon lien avec les descentes invisibles supraconscientes se noue comme cela : en demeurant “à ma place du dessous”, réceptrice de plus grand et plus étrange—que ce que je pourrais produire moi (avec ma seule persona).
Mon enfant-nounours—mon corps émotionnel donc, se trouve ainsi mobilisé pour recevoir ce que l’esprit me dicte littéralement : j’entends les mots, et les enchaîne sans relâcher un instant l’attention. Il y a un mouvement, un développement, une chute et une fin. C’est psycho-sensoriel ; cela s’apprend en s’exerçant. Cela me maintient... Je n’y suis pour rien. ... .
Mon enfant-nounours va s’endormir maintenant. Il a épuisé ce qui lui sert de filon. ...

akmi, 19 avril ‘18 - 6h06

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